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Maj le 20/02/2021
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Lorsqu'on examine les Papiers de Galois, même sur les microfilms numérisés et téléchargeables en pdf sur le site de la bibliothèque de l'Institut de France, une mention nous intrigue, p.36 de la section 2. Celle d'une adresse :
Galois, rue d'Enfer, 61.
Soulignée d'un long trait, cette mention n'est pas de la main d'Évariste et pas davantage de celle d'Auguste Chevalier à qui Évariste avait laissé la totalité de ses travaux. Le feuillet sur lequel figure cette adresse a été plié en deux et l'on distingue par transparence (la transparence d'un pdf sur un écran d'ordinateur oblige tout de même à se crever les yeux !), les lignes d'un recto, dont on devine, par comparaison avec la page précédente, la 35, qu'il s'agit du feuillet 78 des Papiers, lequel est précédé, p. 34 du feuillet 77, et p. 33 du feuillet 76. Cet ensemble constitue la copie, effectuée par Auguste, du manuscrit original d'un article intitulé : Discussion sur les progrès de l'analyse pure, qu'Évariste destinait à la Revue Encyclopédique, écrit, selon Robert Bourgne et Jean-
La mention de cette adresse ressemble à un aide-
Alfred, le jeune frère d'Évariste (de 3 ans son cadet) qui était artiste peintre, vivait ici avec sa mère jusqu'au 16 décembre 1841, date de son mariage avec Henriette, Alexandrine, Élodie Chantelot 2 . Il se pourrait ainsi que le " Galois " habitant au 61 rue d'Enfer, soit justement Alfred (puisque sa mère, du fait de son remariage, s'appelait maintenant madame veuve Loyer) qui s'est tant démené pour faire connaître le travail de son aîné.
Alfred ne s'est jamais tenu éloigné de sa mère, car une fois marié, il s'est installé au 57 de la même rue d'Enfer Saint-
Évariste Galois, deuxième du nom, petite étoile qui a traversé le ciel de son papa, plus vite encore que son oncle météore qui n'était pas encore illustre ! Une vie comme une nouvelle tentative, un bégaiement du destin, qui se solde une fois de plus par un échec. Mais cette petite présence qui murmure, surgie de ce document, suffit à nous dire la force tenace de la fidélité d'Alfred et son affection pour son grand frère.
Un autre détail, dissimulé dans l'acte notarié de l'inventaire après décès d'Alfred 3 , nous saute au cœur. Il se trouve dans l'inventaire de la garde-
Une tunique de garde national !
Vous vous exclamez une fois ces mots déchiffrés. Une foule de questions vous assaille.
À qui appartenait cette tunique ? À Évariste ? Comment Alfred l'avait-
in Évariste Galois, Écrits et mémoires mathématiques, éditions Jacques Gabay 1997, p. 506
Contrat de mariage du 14.12.1841, Archives Nationales, minutier central des notaires : ET/XXIX/1086
Archives Nationales, minutier central des notaires : ET/XXIX/1124
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Les 24000 francs du reliquat de la vente de la pension Galois étaient donc conservés au chaud dans les coffres du tabellion qui faisait sa pelote, accordant en échange un intérêt de 5% par an.
" Galois, rue d'Enfer, 61. " Voici ce que j'ai pu déduire de cette énigmatique mention, et me conformant aux conseils d'Évariste, je conclurai simplement en disant : " Je ne sais pas le reste ! "
JC
Commencé le 13 janvier 2019
En compulsant à nouveau ma documentation pour les besoins de la présentation des deux textes d'Évariste : Sur l’enseignement des sciences et Préface, j'ai retrouvé dans les Papiers de Liouville, la mention de l'adresse qui avait suscité la recherche ci-
JC
Additif du 13 août 2020
Quand Alfred écrit cette lettre, Evariste est mort depuis quinze ans et demi. Il est heureux de constater que sa disparition, conjuguée à son succès naissant, semblent avoir enfin adouci le cœur de Mme Galois.
On sait que Jacobi a écrit à Alfred Galois pour lui demander des précisions notamment sur le travail d'Évariste concernant les fonctions elliptiques et qu'Alfred lui a répondu le 17 novembre 1847 :
« […] Ainsi on n’a rien retrouvé concernant la théorie des fonctions elliptiques et abeliennes ; on voit seulement qu’il s’était livré la plume à la main à une étude approfondie de vos ouvrages. Quant à la théorie des équations, M. Liouville et d’autres géomètres que j’ai consultés affirment que son mémoire si durement repoussé par M. Poisson, contient les bases d’une doctrine très féconde et une première application importante de cette doctrine. « Ce travail, me disent-
Et une nouvelle marée de questions sur cette tunique de garde national revient battre vos tempes. Vous aimeriez tellement qu'il s'agisse de la vraie tunique, celle qui a fini sa vie sur le pont Neuf, un certain 14 juillet de 1831, celle d'Évariste ! Vous aimeriez qu'elle s'anime, se remplisse d'une silhouette de brume, se régénère, s'évade de sa prison d'archives... On peut supputer à l'infini, sans autres indices (qui viendront peut-
Cet acte notarié nous apprend également :